En 2014, 9.5% des bébés nés en Suisse étaient concernés par un retard de croissance. Deux spécialistes nous expliquent les causes et conséquences de ce retard, qui n’est souvent pas significatif dans le développement de l’enfant : le Professeur Olivier Baud, chef de service du département de réanimation et pédiatrie néonatales de l’Hôpital universitaire Robert Debré à Paris et Cristina Borradori Tolsa, médecin adjointe du service développement et croissance aux Hôpitaux universitaires genevois (HUG).
Vous préparez une conférence sur le retard de croissance intra-utérin. Quelles sont les causes d’un tel retard ?
Olivier Baud : Les causes en sont multiples. Il peut s’agir de dysfonctionnements vasculaires placentaires. En effet, lorsque le placenta de la mère n’assure pas sa fonction par le biais du cordon ombilical, cela peut créer un retard de croissance intra-utérin. Mais elles peuvent être également maternelles, en raison de la prise de certains médicaments pendant la grossesse, de toxiques, telles que le tabac ou l’alcool, d’autres drogues, voire de malnutrition. En outre, le retard de croissance peut également être dû à un âge avancé ou très précoce de la mère. Une malformation utérine ou une pathologie maternelle déjà existante peuvent également provoquer ce retard. Enfin, la cause peut être fœtale et liée à des maladies génétiques ou des anomalies chromosomiques.
Quels sont les éléments qui permettent d’établir un diagnostic ?
Cristina Borradori Tolsa : Le retard de croissance intra-utérin est un terme générique qui regroupe les cassures de la courbe de croissance du fœtus. A la naissance, le poids du bébé est trop faible pour l’âge gestationnel. Sa taille peut aussi être atteinte, ainsi que son tour de tête qui reflète la croissance du cerveau. Les trois éléments à prendre en compte sont donc le poids, la taille et le périmètre crânien du bébé.
Y-a-t-il un suivi médical particulier pour ces jeunes patients ?
C.B : L’enfant doit être suivi régulièrement par son pédiatre. En général, la majorité des bébés récupère leur retard de croissance durant les douze premiers mois. Si l’enfant est né prématurément, il nécessite d’être suivi de plus près.
Quelles sont les conséquences d’un retard de croissance chez le nouveau-né ?
O.B : De manière générale, le retard de croissance est rattrapé dans les premières années de vie de l’enfant. Cependant, certains bébés peuvent présenter des pathologies respiratoires, digestives et risquent encore plus de souffrir d’infections et d’un dysfonctionnement transitoire du système immunitaire. Le retard de croissance peut également avoir des conséquences tout au long de la vie du patient. Ainsi, des handicaps neurocognitifs, des problèmes moteurs, cognitifs et comportementaux peuvent surgir durant l’enfance. A l’âge adulte, il peut se présenter un risque cardio-vasculaire accru. Enfin, ces patients peuvent également souffrir de maladies telles que le diabète, l’hypertension ou l’obésité, bien que ce dernier point soit encore controversé au sein du corps médical.
C.B : En effet, si dans la plupart des cas le retard de croissance est rattrapé durant la première année, certains enfants peuvent néanmoins présenter des complications neurodéveloppementales tels que l’hyperactivité, des troubles de la coordination, du langage, du sommeil, et des difficultés d’apprentissage pouvant avoir un impact sur la scolarité.
La taille à la naissance est-elle significative quant au développement physique et mental de l’enfant ?
O.B : Un bébé peut naître petit constitutionnellement, sans que cela ne présente aucune complication par la suite. Tout dépend des caractéristiques ethniques et morphologiques des parents et de la programmation génétique du fœtus. En cas de petit poids de naissance « constitutionnel », le taux de prématurité induite est très faible et généralement ces enfants naissent à terme.
C.B : En outre, nous nous fions aux courbes de croissance validées par la Société suisse de pédiatrie, mais il faut néanmoins s’intéresser à l’origine ethnique des parents. La taille de la mère et du père est également à prendre en compte. Il faut donc toujours rechercher la cause du retard de croissance avant de pouvoir s’inquiéter.
Propos recueillis par Alba Queijo | Contenu & Cie
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