Le 2 février, jour de la Chandeleur, est une journée très particulière en Amérique du Nord : il s’agit en effet du «jour de la marmotte», localement appelé «groundhog day». Un évènement très attendu de la population, car potentiellement annonciateur de la fin de l’hiver. Ainsi, de l’humeur d’un rongeur dépend la durée de notre torpeur…
Selon la tradition, il faut ce jour-là se poster non loin de l’entrée du terrier d’une marmotte et guetter sa sortie… Si le temps est clair et ensoleillé, la petite bête sera effrayée par sa propre ombre et de ce fait, retournera dans son trou aussi rapidement qu’elle en est sortie. Le verdict est alors sans appel: l’hiver continuera pendant six semaines. En revanche, si le temps est plutôt nuageux, aucune ombre à l’horizon ! L’animal n’est donc pas pressé de se remettre au chaud, ce qui serait signe d’une fin imminente de l’hiver…
«Si la Chandeleur pleure, l’hiver ne demeure»
Oui, vous faites bien de le remarquer: cette prédiction concernant tout de même une zone qui couvre pas moins de cinq fuseaux horaires et 30 degrés de latitude, on peut s’interroger sur sa crédibilité… Le Service météorologique du Canada a d’ailleurs pris la peine d’analyser sa validité : celle-ci s’avérerait exacte dans 37% des cas; aux États-Unis, le National Climatic Data Center élève le chiffre à 39%. Certaines petites villes nord-américaines se sont malgré tout emparées de la tradition pour doper le tourisme. Les plus cinéphiles d’entre vous connaissent bien sûr Phil, la mascotte de Punxsutawney en Pennsylvannie, qui a rendu Bill Murray complètement dingue*. Mais sachez que Willie et Fred sont eux aussi des rongeurs très célèbres au Canada.
Si outre-Atlantique on guette la marmotte avec ferveur, à Genève c’est un marronnier qui est au centre de l’attention: depuis près de 200 ans, le sautier de la République est en effet chargé de guetter l’apparition du premier bourgeon d’un des marronniers de la promenade de la Treille. À savoir qu’en 2002, le premier bourgeon était apparu dès le 29 décembre! Et, mine de rien, l’année 2003 fut marquée d’une importante canicule estivale au niveau européen. Le bourgeon serait-il plus fiable que la marmotte?
«Blizzard, vous avez dit blizzard?*»
La question est sans doute sur toutes les lèvres (gercées): doit-on désormais ranger doudounes, gants et bonnets une fois les crêpes dorées avalées ? Si le réchauffement climatique est bel et bien une réalité –davantage pour les ours polaires que pour les marmottes d’ailleurs, mais ce n’est pas ce qui nous préoccupe ici– mieux vaut ne pas ressortir dès aujourd’hui vos sandales et bermudas du placard! Car comme dit le proverbe, «une hirondelle ne fait pas le printemps» (pas plus qu’une marmotte ou un bourgeon d’ailleurs…). Rappelons qu’officiellement, dans l’hémisphère nord, le printemps ne débute qu’à l’équinoxe, le 20 ou 21 mars selon l’année. Vous pensiez en avoir fini avec le froid et les intempéries? Que nenni! Les giboulées se rappelleront vite à votre bon souvenir aux alentours de Mardi Gras. Et tandis que vous dégusterez merveilles et autres beignets bien au chaud, vous réaliserez que les saisons suivent finalement leur cours… ou pas. Il faut bien avouer que l’automne dernier s’est fait un peu désirer: l’été indien, particulièrement long, a directement laissé place au froid et à la neige. Même pas le temps d’étrenner son nouveau trench! Où sont donc passés les jours de pluie, le déclin progressif des températures?
Peut-être que le printemps sera bel et bien en avance après tout… ou que l’on sautera directement à l’été et que l’on passera les fêtes de Pâques autour d’un barbecue… Car, au fond, la marmotte n’est sans doute retournée dans son terrier que pour faire son job: sinon, qui met le chocolat dans le papier alu?
*RAMIS Harold, Un jour sans fin, 1993.
Fleur Brosseau | Contenu & Cie
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